samedi 23 mars 2013

A propos du décrochage




Au Québec 26% des jeunes n’ont pas de diplôme ou de qualification secondaire à l’âge de 20 ans. 32% chez les garçons. En France on parle de 140 000 jeunes… 1 jeune sur 5 (plutôt sur 4) se retrouverait dans la vie active sans qualification diplômante supérieure au brevet. On s’en est préoccupé sans mettre en place une stratégie de dépistage et de remédiation qui prenne le problème à sa source.
                Le décrochage coûte cher : chômage, délinquance, drogue, alcoolisme…. Le décrochage représente un manque à gagner de plusieurs milliards pour l’état !
Les prédicteurs sont nombreux : la misère, le milieu, les familles recomposées, des parents peu diplômé et déjà décrocheurs qui ne valorisent pas l’école. Toutefois, l’immigration n’est pas un facteur de décrochage. D’autres élèves qui se retrouvent pourtant dans des contextes favorables vont décrocher : tous ceux qui sont soumis à des désordres somatiques et à des troubles. Mais PISA le montre hélas, l’école renforce l’impact de l’inégalité sociale au lieu de l’équilibrer. Dans notre monde de l’argent roi que nos dirigeants se persuadent enfin que la prise en charge de ces élèves en grande difficulté est une source d’économie considérable… qui pourrait effacer le coût annuel de la dette !
Un décrocheur -on parle d’un jeune ayant quitté l’école- n’est le plus souvent qu’un enfant qui a déjà décroché scolairement au niveau du nœud du CP/CE1 et/ou de la 6e. Le retard scolaire est un signe prédictif évident.
Une des dernières recherches au Québec distingues 4 groupes de décrocheurs : Les discrets, les désengagés, les sous performants et les inadaptés.
Les discrets représentent 40% des décrocheurs : Ce sont des élèves qui ont un niveau scolaire acceptable, qui ne présentent pas de soucis de discipline, qui ne sont pas en situation d’échec et ne sont pas présentés comme risquant décrocher. Les Désengagés ont un rendement scolaire moyen et présentent peu de problèmes de discipline, ils se caractérisent par la faiblesse de leur engagement face à l’école (10%). Les sous-performants ont peu de problèmes comportementaux mais ont un rendement scolaire faible (10%) Les décrocheurs  Enfin, les inadaptés ont un rendement scolaire faible et un haut degré d’indiscipline (40%)
L’abandon des études apparaît comme la solution la plus rationnelle pour mettre fin à un sentiment d’incompétence qui engendre des affects négatifs (frustration, colère, tristesse, ennui). L’abandon est une procédure de sauvegarde : convaincu qu’il est nul et que le système ne peut l’aider, la psychologie comportementale nous montre qu’on abandonne pour éviter le risque suicidaire ou dépressif, pour le cristalliser quelquefois en un autre élément moins ravageur pour la personne : la haine…
On peut s’interroger sur les 40% de discrets. Ils abandonnent l’école à cause d’éléments extrascolaires : maternité, besoin économique, conflit familial, miroir aux alouettes (je pense à certains de mes élèves qui ne rêvent que de devenir frontaliers en Suisse comme leur père pour, sans diplôme, toucher 3 à 4 fois le SMIC)
Dans l’étude réalisée au Québec (ELDEQ) mais qui peut se rapporter à la France, 15% des élèves de 12 ans sont à risque de décrochage scolaire et la moitié (8% de la classe d’âge) ne présentent que peu ou pas de problèmes de discipline) Toutefois, ce qui traverse l’ensemble de ces élèves, c’est qu’une grande partie des décrocheurs appartiennent à des familles aux revenus inférieurs. Hugo serait désolé de constater qu’aujourd’hui encore, la misère forge toujours ses chaînes.
On doit s’arrêter et distinguer les enfants à risque avec indiscipline et ceux à risque sans indiscipline. L’échec scolaire dès la maternelle se caractérise souvent par une indiscipline qui est signalée aux parents et qui devient pour eux prégnante, ce qui les conduit à être moins vigilants à propos de la réussite scolaire. Tant qu’il est gentil ! Persuadons-nous que le processus de désengagement prend naissance en primaire  et retenons que les élèves de 12 ans à  risque de décrochage scolaire au secondaire  se distinguent des autres élèves, par une perception de soi plus négative comme élève, davantage de problèmes d’attention, la nécessité d’un soutien scolaire parental accru et par une  tendance à un plus faible altruisme.
Une fois que tout cela a été dit… il ne reste plus qu’à faire disparaître la misère pour solutionner ce problème ou essayer –avec modestie,  bienveillance et empathie- de compenser ces injustices.

C Blaya, Décrochages scolaires. L'école en difficulté, de Boeck, Bruxelles, 2010.

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