Aujourd’hui, l’aide apportée
aux élèves en français est souvent externalisée, tout comme le sont –je l’ai
déjà évoqué- des projets pédagogiques essentiels comme l’approche du théâtre
qui se retrouve dans des clubs ou des ateliers. L’aide personnalisée en 6e
et 5e sert souvent de bouche-trou dans les emplois du temps et sera
même confiée à des non-spécialistes. Comme toujours face à un problème,
l’Education Nationale a créé un corps famélique de spécialistes (Maître
référent, AS-H…) ou des structures spécialisées (CLIS, ULIS, EREA…) très
autonomes. Les soutiens médicalisées (psy, orthophoniste) ou non (cours sur
internet, cours particuliers, aide des parents…) nous échappent aussi car il
faut reconnaître le manque de feed-back, en général. Ces soutiens opèrent
généralement dans un rapport d’individu à individu, un face à face souvent
marchant qui nous est étranger. Nous sommes confrontés à un groupe d’individus
et en règle générale nos élèves en difficultés ne sont pas des cas aigus.
Ceux-là ont été repérés et sont accueillis par des structures spécifiques. Nous
ne sommes pas confrontés à l’autiste mais à l’Asperger, nous n’avons souvent pas
à faire au 2% de dys lourds mais aux autres, à ceux entre deux eaux. Les
canadiens parlent justement d’élèves handicapés ou en difficulté
d’adaptation ou d’apprentissage (EHDAA) Ils ont engendré l’orthopédagogie !
Méthodes et procédés d'enseignement qui visent à permettre aux enfants, aux
adolescents et aux adultes aux prises avec des difficultés ou des troubles
d'apprentissage, de pallier ces entraves et de se développer au mieux leurs
potentialités.
Nous ne sommes pas là pour
guérir –ce n’est pas notre métier- mais pour, j’aime cette idée, aider les élèves à se développer au mieux de
leurs potentialités. Il faut reconnaître que cette approche, comme dans
tous les pays à économie libérale, sombre aussi dans le mercantilisme et que
l’on voit des plaques « orthopédagogue » sur les devantures des
immeubles de Québec ou de Montréal.
Je ne sais si on peut inclure
l’aide dans le quotidien du cours de français en collège, ce qui est sûr c’est
qu’il faut installer des processus collaboratifs quand c’est possible et ne pas
hésiter, comme le suggère Nadia Mekhtoub dans
Enseigner le français à tous les élèves (SCEREN, 2013), à favoriser les interactions verbales.
J’ai pris l’habitude en 6e et 5e de créer 4 maisons dans la classe. Chaque
maison regroupe différents types d’élèves qui sont invités à collaborer et à
travailler en concertation. C’est les progrès du groupe –et donc des plus
faibles- que je valorise par des systèmes de jetons, de points bonus… un peu
long à expliquer ici. Avouons aussi que je n’ai pas encore eu le courage d’abandonner
l’évaluation individuelle pour ne donner qu’une évaluation collective. Y
viendrais-je ? Je mets toujours en place un défi lecture qui opposera les
4 maisons en fin d’année, Le travail d’approche du théâtre se fait aussi par
maison (réalisation d’un théâtre d’ombre par chaque groupe) ainsi que de
nombreux exercices de création (contes…). L’important c’est que tous les élèves
soient confrontés à des enjeux complexes, et c’est en général à ces occasions
que les dys. donnent toute leur mesure. C’est aussi à cette occasions que les
malentendus sociocognitifs se font jour. Sans entrer dans les arcanes de la
psychologie ou de l’analyse transactionnelle, nos élèves en difficulté ont mis
en place des jeux de vie, des processus d’évitement souvent vis-à-vis des
adultes (je fais semblant d’écouter alors que je suis ailleurs, j’augmente ma
dysgraphie pour justifier la floraison de mes erreurs, etc.) pour déjouer la
surcharge cognitive. Ils sont très forts pour cela. Les « cancres »
ont toujours établi des stratégies d’évitement. Ces jeux de vie ne sont pas
acceptés par leurs camarades dans le cadre d’un travail collaboratif.
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